Primaires américaines: Trump vs Sanders, le jeu des 9 erreurs

2 avril 2016

Primaires américaines: Trump vs Sanders, le jeu des 9 erreurs

175360_600Qu’y a-t-il de commun entre Donald Trump, promoteur immobilier à la tête d’une multinationale de 500 entreprises et Bernie Sanders, sénateur démocrate socialiste du petit Etat du Vermont?
A peu près rien, si ce n’est le terme de populiste, que la presse américaine utilise pour qualifier – ou disqualifier – les deux ‘outsiders’ qui ont surgi dans les primaires à l’élection présidentielle de 2016.

 

1 – Tous deux autofinancent leurs campagnes électorales

Plus petit dénominateur commun, les deux candidats critiquent l’« establishment » des deux grands partis politiques. A droite,Trump devance tous ses concurrents dans le camp Républicain. A gauche, Sanders vient de remporter coup sur coup cinq Etats contre la favorite du parti Démocrate, Hillary Clinton.
Donald Trump se vante d’être tellement riche que personne ne peut l’acheter. Sa valeur nette* est estimée à 10 milliards. Bernie Sanders, lui, « pèse » 330 000 dollars.Tous deux autofinancent leur campagne. Trump en puisant dans son argent de poche, en organisant ses meetings dans ses hôtels et ses casinos, et en vendant à ses supporters ses produits dérivés made in China. Sanders en cumulant les dons de millions de citoyens, – 27 $ en moyenne -, qui ont versé jusqu’à présent 140 millions de dollars à sa campagne.

* Différence entre les actifs, la valeur des biens, et les passifs – crédits, charges, amortissements –.

2 – Deux hommes en colère

Avec leur franc-parler, Bernie Sanders et Donald Trump soulignent le ressentiment de la classe ouvrière, fâchée avec les élites politiques, frustrée par la stagnation économique et inquiète pour son avenir. Leurs réponses à ces sentiments sont cependant radicalement différentes. Sanders propose des mesures détaillées pour taxer les plus riches, augmenter les droits sociaux et le salaire minimum, réformer les institutions et lutter contre le changement climatique. Son slogan: ‘A future to believe in’.
Donald Trump se garde bien d’être spécifique sur les propositions impopulaires portées par le parti Républicain – suppression d’Obamacare, coupes dans les budgets sociaux, privatisations – et surfe sur le racisme, la xénophobie et la misogynie. Il veut bannir les musulmans du pays, construire une grande muraille de Chine entre Mexico et les Etats-Unis, et punir les femmes qui avortent. Son mantra: ‘Make America great again!

Unknown-33 – Contre la classe des milliardaires ( et tout contre )

Bernie Sanders et Donald Trump accusent tous deux les banques, les entreprises et les grosses fortunes de confisquer le processus démocratique au profit de leurs intérêts, en investissant massivement dans le financement des candidats par l’intermédiaire des super PAC. Le motto de Bernie Sanders, ‘Get big money out of politics’ est l’une des revendications du mouvement Occupy Wall Street, pour exiger une redistribution des richesses et des politiques favorables aux pauvres et aux classes moyennes.
En matière de corruption, Donald Trump, lui, parle avec l’expérience du corrupteur: « Jai donné beaucoup aux politiciens parce que quand je veux quelque chose, je lobtiens. Et quand je les appelle, ils me baisent le cul ». Nuance.

4 – Traités de libre-échange: meilleur deal contre juste prix

Si Trump et Sanders critiquent la globalisation, leurs visées sont diamétralement opposées. Trump pense que les traités de libre-échange desservent les intérêts des entreprises américaines, « parce qu’ils sont négociés par des idiots ». Son credo, chercher le meilleur deal, en s’asseyant sur toutes les contreparties nécessaires aux négociations bilatérales. Il veut augmenter les taxes sur les importations et les entreprises qui délocalisent; supprimer les droits de succession, les impôts sur les entreprises, et baisser les taxes sur les revenus du capital et les dividendes, dont le taux est bien inférieur à celui des salaires. Cherchez à qui profite le crime…

Bernie Sanders s’oppose aux accords de libre-échange sans entrave qui bénéficient aux multinationales au détriment des salariés, au Nord comme au Sud. Il lie le global au local et le politique à l’économique, et dénonce les effets pernicieux du creusements des inégalités entre pauvres et riches à l’échelle de la planète.

5 – Good cop contre bad cop

En matière de conflits dans le monde, Trump et Sanders considèrent tous deux que l’interventionnisme américain est trop couteux et crée plus d’instabilité et d’animosité envers les Etats-Unis. Bernie Sanders, opposé à la guerre en Irak et en Libye, envisage les interventions militaires comme un dernier recours et pense que la politique étrangère consiste aussi à redéfinir le rôle des Etats-Unis dans un monde global économiquement.

Donald Trump a une approche mercantiliste des relations internationales. Il envisage les pays étrangers comme des entreprises, déconnectées de tout contexte géopolitique. Outre sa sympathie pour les régimes autoritaires, il ne voit pas l’intérêt des alliances en matière de défense, sauf à faire payer au maximum les pays étrangers qui ont sur leur sol des bases militaires américaines et des accords de protection avec les Etats-Unis. Face à l’Etat Islamique, la stratégie de Trump est simple: bombardement jusqu’à l’anéantissement et prise de contrôle des puits de pétrole. Cela vous rappelle quelque chose ?

6 – Plus blanc que blanc?

Bernie Sanders et Donald Trump réalisent leurs meilleurs scores auprès de l’électorat blanc, ce qui tendrait à les disqualifier pour la Maison blanche. Ces considérations masquent le gouffre qui sépare les deux candidats et leurs électeurs: Bernie Sanders est un old white guy, – juif de surcroît – , qui rallie la génération des 18 – 35 ans, la plus diverse qui soit, et celle-la même qui s’oppose aux discours racistes de Donald Trump en perturbant ses meetings. Donald Trump flirte avec un électorat plus âgé et caresse dans le sens du poil les white supremacists, ne rechignant pas sur le soutien d’un dirigeant du Ku Klux Klan, et justifiant le recours à la violence et à la torture. Selon un sondage relayé par le New York Times, les valeurs morales des supporters de Trump (autorité, travail, famille, patrie) sont aux antipodes de celles des supporters de Bernie Sanders (liberté, égalité, empathie). Et vice-versa.

176679_6007 – Candidats 3.0

Donald Trump se considère comme le « meilleur auteur en 140 signes ». Le florilège de ses réflexions les plus absurdes est compilé sur son compte Twitter, suivi par plus de 7 millions de followers. Trump abuse des médias sociaux et de la provoc’ pour faire parler de lui pour pas un rond. Il comptabilise le plus grand nombre d’abonnés sur Instagram. Bernie Sanders affiche plus du double d’abonnés que Trump sur Youtube, ce qui compense un peu son déficit de temps d’antenne dans les médias traditionnels. Sanders devance tous les candidats sur Reddit, et les geeks qui ‘feel the Bern’, sont prompts à utiliser toutes les ressources numériques pour organiser les militants sur le terrain.

8 – Emportés par les foules

Depuis le lancement des primaires, Bernie Sanders est le candidat qui attire le plus de monde dans ses meetings. Dans les grandes villes, son public dépasse régulièrement les 10 000 personnes, comme à Phoenix (11 000) Seattle (15 000), Portland (28 000) ou plus récemment à Los Angeles (27 500 + 16 000 à l’ extérieur). A titre de comparaison, Hillary Clinton a réalisé son plus grand rassemblement public lors du lancement de sa campagne à New York, avec 5 500 personnes. Donald Trump revendique aussi d’avoir les plus grosses…foules. Son twitt affichant 15 000 participants lors d’un meeting à Phoenix, a cependant été démenti par les pompiers, qui ne plaisantent pas avec les consignes de sécurité: 4 200 personnes maximum. C’est déjà beaucoup plus que tous les autres candidats républicains.

9 – Folie des grandeurs

Chacun sait qu’il ne faut pas être tout à fait normal pour songer à être président, en se rasant ou pas. Il faut dire que dans la course folle à l’investiture, cette année électorale offre un beau panel aux amateurs de psychopathologie. Ted Cruz, en croisade pour instaurer une théocratie, présente tous les signes du fanatisme. La mythomanie d’Hillary Clinton et ses nombreux petits arrangements avec la vérité aboutit à ce que 56% des électeurs la considèrent malhonnête et non digne de confiance. Bernie Sanders, qualifié d’idéaliste, semble affligé d’un certain ‘don quichotisme’, dans son dédain pour l’enrichissement personnel et sa constance à dénoncer les injustices. A l’opposé, les symptômes de Donald Trump, – égocentrisme, logorrhée, harcèlement, diffamation et tendances procédurières, – le classent clairement dans la catégorie des pervers narcissiques. Celle des plus grands manipulateurs!

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